Chronique Sociétale 2022-3

Les numéros en italiques renvoient aux titres des documents qui seront prochainement publiés sur le site internet de Contrat Social et réservés aux membres de l’association


L’actualité ne s’est guère renouvelée ce trimestre, même si le COVID semble avoir disparu, tandis que la guerre en Ukraine, toujours semblable à elle-même, ne se prête pas à beaucoup de nouveauté. On notera cependant sur ce point un article de Andrei Pertsef, un journaliste russe, repris par Atlantico, sur l’opinion publique russe, évidemment un aspect crucial quoique sous estimé du problème (23_3_1). .

Cela dit, nous éviterons dans cette chronique les sujets d’actualité immédiate, pour nous tour-ner vers les débats plus permanents et plus philosophiques. Ce sera d’abord les questions économiques, avec un focus sur l’énergie, et les revirements de l’opinion au sujet du nucléaire. Nous examinerons ensuite quelques contributions relatives au changement climatique, qui nous conduiront tout naturellement à l’écologie. Puis nous aborderons des questions plus générales de politiques générales, avec l’immigration, et l’éducation. Enfin, nous présenterons une dernière pépite relative à l’intelligence artificielle...

L’Ukraine et l’opinion publique russe

Assez curieusement, cette opinion russe ne semble pas s’organiser autour des « pro » ou des « anti »-guerre, comme cela se ferait sans doute en occident. Elle est surtout caractérisée par l’angoisse : « mon Dieu, que le ciel ne tombe pas sur la terre avec cette histoire de guerre ukrainienne ! » semble être la préoccupation principale du peuple russe. Et, bien sûr, cela ne pousse pas forcément à la paix : il faudra seulement à Poutine l’intelligence de ne pas trop parler de catastrophe pour que tout se passe bien pour lui... Hélas !

L’économie

Il est évidemment impossible, ce trimestre ; de ne pas aborder la question des retraites. « Travailler plus, car on vit plus vieux » : Laurent Jeanneau, le directeur d’Alternatives économiques s’insurge contre ce slogan dont il conteste la pertinence (23_3_2) : il montre de façon assez convaincante (appuyé par le démographe Hervé Le Bras) que l’espérance de vie a diminuée en France (mais aussi aux USA) depuis une vingtaine d’années... et pas seulement à cause du COVID !. En plus, montre-t-il, la durée du travail a beaucoup baissé depuis 50 ans, sans que cela n’entraîne une baisse de la croissance et du bien-être...



Ses arguments sont certainement discutables. JC Angulo parle de « manipulation de données ». De toutes façons, dit-il, le déficit avéré des régimes de retraite en France est de l’ordre de 35 milliards d’euro, financés par le déficit public. Et surtout, il est tout de même évident que, mécaniquement, si le départ à la retraite est retardé, toutes choses égales d’ailleurs, les recettes des régimes de retraite sont augmentées, et les dépenses réduites. Il n’en demeure pas moins que souligner l’imperfection des prévisions démographiques est indispensable à une vision réaliste du problème, aussi bien comptable qu’économique.

Et ceci nous amène à un second document publié dans Le Monde (23_3_3) : avons-nous be-soin d’un plan ?. En se basant sur un ancien livre de Pierre Massé, l’auteur montre comment, au cours des « 30 glorieuses », le plan, en France, a servi à faire circuler l’information sur l’avenir, et à éviter les trop grandes erreurs de prévision à moyen terme. Mais après 1975, les « chocs pétroliers », et l’instabilité des prix des matières premières ont rendu ses prévisions illusoires, et donc l’institution inutile. L’auteur met en exergue les erreurs qui ont conduit aux échecs du Minitel et de Concorde, ainsi qu’au surinvestissement dans le nucléaire (lequel, par voie de retour, a conduit à un désinvestissement exagéré dans cette technologie). Il en rend « le Plan » au moins partiellement responsable, sans doute injustement. Il conclut par un appel au libéralisme, souhaitant que l’économie se dégage des pesanteurs étatiques.

Sur ce dernier point, il a sûrement au moins partiellement raison, encore que l’on puisse se demander si les pesanteurs de grandes entreprises privées ne sont pas tout aussi catastrophiques que celles d’un état trop puissant. En fait, la grande question, c’est de savoir si les prix sont capables de véhiculer toute l’information nécessaire pour effectuer à bon escient les investissements souhaitables. La réponse est sûrement négative. Mais nous n’avons toujours pas trouvé de formule réellement indiscutable pour y remédier... .

Toujours dans Le Monde, (23-3- 4), on trouve sur la crise du logement un inquiétant article qui illustre parfaitement les propos précédents : faute de mises en chantier dans toutes les catégories de logements, il faut s’attendre dès maintenant et dans les prochaines années à des difficultés majeures dans ce domaine, avec « des jeunes qui restent plus longtemps chez leurs parents, des ménages qui habitent encore ensemble alors qu’ils sont séparés et des temps de trajet très importants ».

Les règlements « écologiques » sur l’abolition des « passoires thermiques » et les « politiques anti-bétonnage » n’arrangent évidemment pas les choses, pas plus que les hausses de taux d’intérêt liées aux politiques anti-inflationnistes. Bien évidemment, une « planification à la Française » aurait peut-être pu mobiliser les énergies et les investisseurs dans ce domaine (encore que, les anciens s’en souviennent, la pénurie de logements avait atteint de sommets dans les années 1970, à la grande époque du « Plan ». ). En tout cas, le logement est un domaine dans lequel le « libre marché » trouve assez vite ses limites...

Il n’y a pas que le logement : dans la revue Sésame (une revue de vulgarisation de L’INRAE) , Marie Tsanga-Tabi, chercheure à l’INRAE propose un tableau émouvant des problèmes d’accès à l’eau potable pour les populations pauvres (.23-3-5). Il s’agit évidemment d’un problème sérieux, l’accès à l’eau constituant, avant même la nourriture, un besoin fondamental de tout être humain. En même temps, ce document est aussi un curieux mélange de préoccupations écologiques et d’incompétence économique. En réalité, le problème posé est celui de la pauvreté, les souffrances causées par le manque d’eau n’en étant que l’une des manifestations. Dès lors, l’inventaire des me-sures prises ici ou là pour atténuer le problème, comme de refuser de couper l’eau aux mauvais payeurs, montre surtout le souci de ne pas aller au fond des choses.... Et c’est là l’une des caractéristiques des bureaucraties modernes, et l’une des tares de nos sociétés.....

Nous n’irons pas plus loin dans cette analyse, qui, n’en doutons pas, sera reprise dans les pro-chaines chroniques. Tournons-nous plutôt vers l’une des solutions du problème de l’eau (et de bien d’autres !), l’énergie.

Les politiques énergétiques

De fait, André Pellen, dans Contrepoint, (23-3-6) apporte « la » solution au problème de l’eau : l’eau n’est pas rare à la surface de la Terre. Il y en a plein la mer et les nuages. Elle n’est jamais définitivement détruite, car elle se reconstitue rapidement si elle est décomposée en oxygène et hydrogène. Le "problème de l’eau", ce n’est donc pas la rareté. Mais cette eau, il faut l’apporter au bon moment au bon endroit sous la forme voulue (pureté et pression). Et pour cela, il faut des tuyaux et surtout de l’énergie. Le « problème de l’eau » est donc celui de l’énergie. Les centrales nucléaires devraient pouvoir le résoudre. Il y a une grave objection à cette idée : il faut de l’eau pour refroidir les centrales nucléaires. C’est vrai, mais l’énergie qu’elles produisent ne représente qu’une faible fraction de ce qu’il faut pour « fabriquer » l’eau nécessaire, d’autant qu’une bonne partie de l’eau utilisée pour le refroidissement est récupérée. Alors, pourquoi se priver ?

Il y a beaucoup de bon sens dans cette approche, qui se heurte un peu au coût de construction des centrales nucléaires nécessaires, et beaucoup au rejet du public.

Mais la question de l’eau n’est qu’une toute petite partie de celle de l’avenir énergétique de l’humanité. De ce point de vue, il faut signaler un remarquable article de Claude Brecher dans Commentaires (23_3_7). Bien écrit et supérieurement documenté, il est difficile à résumer ici. On en donnera seulement quelques impressions de lecteur qui ne remplaceront pas une lecture sérieuse de l’original.

L’auteur commence par fustiger le débat actuel, axé sur l’idée qu’il faut un mélange (le « mix énergétique ») entre les différentes sources d’énergie. Il faut selon lui avoir une seule source, la bonne. Et de ce point de vue, il n’en voit pas d’autres que le nucléaire. Il écarte l’argument du « danger » : depuis un demi-siècle, le nombre de morts pour une production donnée est plus de 1 800 fois plus important pour le charbon que pour le nucléaire, 250 fois pour la biomasse, 15 fois pour l'hydraulique et… 1,7 fois pour l'éolien (en prenant en compte les accidents de Tchernobyl et de Fukushima). Même s’il est sans doute possible de chipoter sur ces évaluations, elles sont impressionnantes. Restent les objections liées à la dépendance énergétique vis-à-vis de l’étranger, et à la gestion des déchets.

Sur la dépendance énergétique, il remarque qu’il est sans doute préférable de dépendre de l’Australie ou du Canada pour l’uranium, plutôt que de la Russie pour le gaz naturel... Quant aux déchets, c’est là que commencent à jouer les fameuses « échelles de temps » qu’il évoque dans le titre : les déchets actuels vont en effet durer des centaines d’années, et c’est là sans doute l’objection majeure au nucléaire. En même temps, des techniques existent pour s’en débarrasser plus rapidement, et même pour refaire du combustible à partir des déchets (il est bien regrettable que la France ait renoncé à ses recherches sur la question, en particulier en abandonnant les « surgénérateurs » ). Il faudrait évidemment faire des plans à long terme pour y penser, et c’est bien ce qui nous manque.

Et si les déchets constituent sans doute le problème le plus aigu du point de vue de ces échelles de temps, beaucoup d’autres aspects de l’industrie nucléaire ne peuvent être abordés que dans le long terme. Or cette situation s’oppose à la faible durée des mandatures politiques : le dirigeant en charge de la décision, élu pour quelques années, n’a aucune incitation à voir à long terme, et c’est là que se trouve la grande faiblesse de nos institutions démocratiques...

Bien au-delà du problème du nucléaire, on débouche donc ici sur une grave question de socié-té, qui met en cause l’efficacité des institutions. Je ne suis pas sûr qu’elle ait été envisagée par Jean-Jacques Rousseau dans son Contrat Social. Ce document est donc à méditer.

Le Climat

C’est un vaste sujet, dont nous ne mentionnerons ici que quelques articles sur le réchauffement climatique.

Le Huffpost (23_3_8) , sous la plume de Pauline Brault, présente un tableau à faire frémir de la France soumise à un réchauffement moyen de 4 ° par rapport à l’ère préindustrielle: l’été caniculaire de 2022 deviendrait la norme, juste un peu interrompu par des pluies diluviennes qui deviendraient une autre norme. Le littoral serait grignoté par l’élévation du niveau des mers, de nouveaux virus feraient leur apparition (on se demande en quoi cela peut être dû à la chaleur !), des cultures gour-mandes en eau disparaîtraient (parmi lesquelles le maïs : or il est bien connu de tous les agronomes que le maïs est la céréale qui utilise le moins d’eau par tonne de production), etc...Ce scénario aurait été validé par Christophe Béchu, le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires... C’est là l’un des discours rituels de la tribu, et ne mérite qu’un peu de condescendance. Ce n’en est pas moins aussi un témoignage de la façon dont la Science est instrumentalisée par ces courants politiques, car, en vérité, seule l’expérience permettra de savoir si cela correspond à une réalité (et même si peut-être, il faut à tout hasard se préparer à des éventualités de ce type)..

Toujours dans la même ligne, Christian Gollier, membre du GIEC, déplore, selon Atlantico, l’indigence économique du dernier rapport de cet organisme (23_3_9). En réalité, c’est presque le contraire ; il se félicite de ce que le GIEC proclame maintenant l’origine anthropique du réchauffe-ment climatique (ce qu’il avait refusé de faire jusqu’ici !), et recommande la généralisation de la « taxe carbone » (La position du GIEC était auparavant que cette origine anthropique était très probable, mais non formellement prouvée, cependant que l’organisme s’interdisait de donner aucune consigne aux politiques pour l’éviter).

Cette idée de « taxe carbone redistribuée » est en réalité une vieille idée d’économiste libéral, très bien expliquée par André Larané, le rédacteur en chef de la célèbre revue d’histoire Hérodote (23_3_10). On aurait pu penser qu’un historien comme lui aurait soutenu des thèses analogues à celles présentées dans le document précédent. A ma surprise, il ne s’intéresse qu’au temps présent, et ne voit pas d’autre issue à la malédiction du réchauffement climatique qu’à travers une baisse drastique de la consommation de biens de tous ordres. Il envisage donc une « taxe carbone » généralisée, qui augmentera les prix de chaque bien proportionnellement à son contenu direct ou indirect en carbone, ce qui incitera les consommateurs à éviter ceux qui seront les plus taxés. Il complique cependant encore un peu le système en prévoyant d’en redistribuer le produit de façon uniforme par tête, ce qui permettra aux pauvres de l’acquitter, et pèsera sur les riches dont la consommation d’énergie (qu’elle soit directe ou indirecte) est évidemment beaucoup plus grande que celle des pauvres.

A vrai dire, on ne comprend pas bien comment une telle taxe, immédiatement « remboursée » au payeur, pourra avoir un effet significatif. Certes, l’homo economicus pourra réutiliser la manne qui lui sera ainsi allouée, pour acheter d’autres biens (plus « écologiques » !) que ceux dont le prix aura ainsi augmenté. Mais il faut être bien naïf et bien inconscient pour ne pas voir que les biens ainsi taxés sont généralement considérés comme « indispensables », « non-substituables », et donc fort peu sensibles aux signaux du marché. C’est bien pour cette raison que la taxe carbone instituée il y a quelques années en France a déclenché la révolte des « gilets jaunes » : les victimes n’ayant en fait aucun moyen d’y échapper. La taxe en question représentait donc pour eux une perte sèche de revenu et donc de bien-être... Faudra-t-il recommencer cette aventure ?

Et tout cela sans parler des difficultés liées à l’évaluation de la base de la taxe (il faut connaitre pour chaque bien son contenu en carbone à la fois « direct » et « indirect ») ainsi que des complication de sa perception (bien plus difficile que pour la TVA !). On est donc un peu surpris qu’un économiste aussi éminent que Christian Gollier se fasse l’apôtre d’un tel système....

L’écologie

Et bien sûr les réflexions précédentes sur les politiques climatiques ne sont qu’une partie de celles que l’on peut avoir à propos des politiques « écologiques ». Nous n’irons pas plus loin aujourd’hui dans ce sens, sinon pour citer un article cette fois réellement passionnant paru dans Hérodote sous le titre d’«Histoire de l’écologie » (23_3_11).

De fait, les préoccupations que nous qualifions aujourd’hui d’ « écologiques » sont en fait de tous les temps. L’épopée de Gilgamesh, qui date du 13eme siècle avant notre ère, montre déjà que ses auteurs sont conscients de ce que le recul des forêts entraîne l’aridification de régions entières... Plus près de nous Malthus est évidemment, dans les années 1800, le père de tous les prévisionnistes pessimistes qui craignent pour l’avenir de l’Humanité. Dans l’Algérie de 1860, le caractère aride du climat est attribué au manque de forêts, et l’administration impose, pour y remédier, la plantation de 10 000 eucalyptus !

Ce ne sont là que des exemples des débats « écologiques » avant la lettre qui ont agité nos sociétés depuis presque toujours... et ce sont là aussi des éléments historiques à méditer pour interpréter les dérives actuelles en la matière.

Faut-il mettre au nombre de ces dérives la définition du crime d’écocide, revendication de divers mouvements « écolo », qui a reçu un début de satisfaction dans le code pénal français, comme le montre un article de The Conversation (23_3_12) ? Nous laisserons au lecteur curieux le soin d’examiner cette question...

La Politique

Si nous nous tournons maintenant vers l’actualité politique (en excluant, bien sûr ce qui est « politicien »), il vaut la peine de s’intéresser à un nouvel article de Hérodote (23_3_13) qui fait le bilan de 60 ans de crises politiques depuis Mai 58.

Beaucoup de gens voient la situation actuelle en France comme une « crise » : un Président qui ne s’entend pas trop avec la Premier Ministre, des manifestations violentes un peu partout au moindre prétexte, la visite du Roi d’Angleterre à Paris annulée « parce qu’on ne peut pas garantir sa sécurité »... Tous ces faits sont les symptômes d’une crise de nos institutions, alors qu’avec la guerre en Ukraine (et dans pas mal d’autres endroits !), il serait tout de même bon de présenter un front uni face à l’adversité. Or André Laramé, sans formellement penser le contraire, nous rappelle que de telles situations se sont rencontrées dans les années passées récentes, et cela, sans dommage définitifs... La lecture de ce document rappellera pas mal de souvenirs à beaucoup d’anciens... A défaut de sortir de la crise, ce sera toujours une satisfaction...

Cela dit, mieux vaut prévenir que guérir. Deux publications, ce trimestre, s’intéressent aux moyens à mettre en œuvre pour cela dans une société démocratique :

Atlantico (23_3_14), sous la plume de trois juristes, Bertrand Combrade, Nathalie Goulet et Alain Lambert, s’interroge sur la qualité insuffisante des « études d’impact » requises avant tout examen de beaucoup d’actes législatifs. De fait, le législateur, s’il a en général une idée assez claire des raisons pour lesquelles une loi est proposée, n’a souvent pas les moyens de prendre en considération les effets secondaire involontaire d’un acte législatif. C’est pourquoi -la vaste majorité des citoyens l’ignore - des mécanismes institutionnels ont été imaginés pour obliger certains projets de loi à faire l’objet d’une « étude d’impact » supposée révéler les possibles effets indésirables des mesures envisagées.

Hélas, cette mesure entraîne elle-même ses propres effets induits : car le travail nécessaire pour réaliser ces études d’impact est le plus souvent confié à des groupes privés, qui ont tendance à le bâcler, et à ne mettre dans leur rapport que ce qui fait plaisir aux membres du groupe parlementaire auteurs du projet. Dans ces conditions, un tel ouvrage est largement inutile, et la rémunération de ses auteurs de l’argent gâché. Il y a donc quelque chose à faire dans ce domaine. Mais quoi ? An moins, le problème est posé !

De son côté, pour mieux impliquer les citoyens, Nicolas Pauthe, dans The Conversation (23_3_15) propose de leur accorder plus d’initiative législative en élargissant l’usage du référendum d’initiative populaire. A l’heure actuelle, en France, ce mécanisme qui permet aux citoyens de forcer à l’organisation d’un référendum, est entouré de tellement de garde-fous qu’il est inutilisable. D’autres pays, comme l’Espagne ou la Suisse, parviennent à s’en servir, et dans des conditions très favorables. Pourquoi n’essaierait-on pas cela dans notre pays ? Ce serait de nature à désamorcer les crises ! Peut-être Contrat Social devrait il y réfléchir ?

L’éducation

Cela dit, il est clair que les citoyens ne pourront jamais exercer leurs droits convenablement sans un minimum d’éducation... Et là, le bât blesse très fort !

Dans Atlantico (23_3_16), Gille de Robien pointe une nouvelle fois le mauvais classement de la France dans les comparaisons internationales sur le niveau des élèves (tout en relativisant un peu, car les méthodes utilisées pour réaliser ces classements ne sont pas sans reproche). Il accuse les séquelles de « Mai 68 » d’être responsable de cette situation. Hélas, il ne propose pas beaucoup de solutions...

Dans la même veine, sous la plume de François Jacob (un célèbre Prix Nobel de médecine) , Le Monde se plaint cette fois de médiocrité contemporaine de la recherche française (23-3-17). Il pré-sente au passage un excellent survol historique des politiques scientifiques, de Léon Blum à Charles de Gaulle, et s’insurge de voir la bureaucratie remplacer l’imagination. Bien évidemment, dit-il, la mauvaise qualité du système éducatif ne facilite pas l’éclosion des vocations de chercheur.

Enfin, Alternatives économiques (23-3_18) illustre les propos précédents en pointant les décisions prises à propos de l’organisation des épreuves du baccalauréat, avancées à courant mars, donc bien avant la fin de l’année scolaire, pour, dit-on, donner assez de temps au déroulement de « Parcours-sup » (un système qui permet à un élève de terminal de choisir la suite de ses études dans l’enseignement supérieur). C’est là qu’on voit l’Administration administrante prendre le pas sur tout bon sens, puisque les élèves n’auront pas pu terminer leur programme au moment de passer les épreuves du baccalauréat.

Tout ceci n’augure rien de bon pour l’avenir....

L’intelligence artificielle

Enfin, nous terminerons par quelques remarques sur « l’intelligence artificielle », un sujet abordé lors de l’un des derniers « déjeuners de Contrat Social ».

On sait que « l’intelligence artificielle » est un semble de données et de programmes informa-tiques, que l’on peut interroger sur Internet. Il en existe plusieurs versions, la plus connue à l’heure actuelle étant « ChatGPT ». On peut poser une question à ChatGPT, par exemple « qu’est-ce que l’art ? ». Et il répond par une suite de phrases que l’on croirait écrite par un authentique philosophe : « La définition de l'art peut varier selon les personnes et les cultures, mais en général, l'art est considéré comme une forme d'expression créative qui est appréciée pour son esthétique ou sa valeur émotionnelle. L'art peut prendre de nombreuses formes, notamment la peinture, la sculpture, la musique, la danse, le théâtre, la littérature, la photographie et la cinématographie, entre autres.
L'art peut également être considéré comme un moyen de communiquer des idées et des sentiments, ainsi que de susciter des réactions émotionnelles chez les spectateurs ou les auditeurs. En fin de compte, la signification et la valeur de l'art sont souvent déterminées par l'interprétation et la perception individuelles de l'observateur, ainsi que par le contexte culturel et historique dans lequel l'œuvre a été créée ». C’est évidemment impressionnant !

Dans le Figaro, Luc Ferry (23_3_20) rendant compte d’un livre récent (Un monde sans travail, Daniel Susskin) se demande si, comme beaucoup de gens le craignent, un tel système ne risque pas de supplanter toute intelligence humaine, et même de remplacer tout travail... Il conclut par la négative, se basant sur l’expérience du 19ème siècle, lorsque l’invention du métier à tisser et de la ma-chine à vapeur suscitait des craintes analogues qui se sont révélées peu fondées.

Une autre référence vient confirmer ses dires de façon inattendue : The Conversation (23_3_19), sous la plume de deux sociologues publie les résultats d’une enquête auprès de jeunes Malgaches employés en nombre à Antanarivo pour « éduquer » la machine et « lui apprendre » les phrases qu’elle devra publier. La raison d’aller chercher ces ressources à Madagascar ? Cette ile est peuplée de jeunes gens éduqués, parfaitement francophones, et peu cher !

Il apparait ainsi que la construction de Chat GPT en Français, sans entraîner de chômage significatif de France même, crée des emplois à Madagascar, tout en prolétarisant les jeunes Malgaches bien éduqués ! On pourrait sans doute creuser la question et généraliser !


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Ce sera tout pour cette livraison de la chronique sociétale... la prochaine paraitra fin octobre....


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