22_03_17_L’express : les écologistes finlandais

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Par Eric Chol

Eric Chol est Directeur de la rédaction de L’Express

Publié le 06/06/2022

· Actualité économique

Vu d'Helsinki, ce n'est pas tout à fait une surprise. Le gouvernement, comme les écologistes, font d'ailleurs mine de relativiser ce qui, vu de France, n'est ni plus ni moins qu'un coup de tonnerre écologique. Car début juin, 400 membres de la Ligue verte, réunis pour une conférence annuelle dans la ville de Joensuu, se sont officiellement convertis au nucléaire, désormais considéré dans le manifeste du parti comme "une énergie durable". Le parti vert souhaite désormais réformer la législation du pays sur l'énergie pour lancer des petits réacteurs. Interrogé par L'Express, Veli Liikanen, le secrétaire général du parti, admet du bout des lèvres cet aggiornamento. "Nous n'avons pas adopté une position entièrement pronucléaire, précise-t-il par e-mail. Je dirais plutôt que notre nouveau programme politique est plus neutre qu'auparavant à l'égard de l'énergie nucléaire, spécialement en ce qui concerne le développement des nouvelles technologies." 

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La réalité, c'est que sous l'impulsion en particulier d'un lobby prosciences au sein du parti vert, les écolos finlandais ont achevé une mutation entamée il y a déjà presque un quart de siècle, lorsqu'ils ont intégré les équipes gouvernementales. Régulièrement aux affaires depuis trois décennies, ils s'étaient toutefois opposés à plusieurs reprises aux projets nucléaires du pays, ce qui les avait conduits à quitter le gouvernement à deux reprises.  

La guerre en Ukraine a changé la donne

Les Verts finlandais, qui ont recueilli 11,5 % des voix aux élections en 2019, s'assurant la présence de 20 députés au Parlement et de deux ministres au sein du gouvernement de coalition dirigé par Sanna Marin, sont en phase avec l'opinion publique du pays, de plus en plus favorable à l'énergie nucléaire (74 % pour, 18 % contre). Un choix qui relève avant tout du pragmatisme : pour la Ligue Verte, dirigée par Maria Ohisalo, la priorité consiste d'abord à réduire l'usage des énergies fossiles. Helsinki, qui s'est fixé comme objectif d'atteindre la neutralité carbone dès 2035 compte notamment sur l'atome civil - très faible émetteur de CO2- pour y parvenir.  

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Déjà, les quatre réacteurs en activité assurent près de 27 % de la consommation d'électricité du pays. La mise en route récente du nouveau réacteur Olkiluoto-3, devrait, quand celui-ci tournera à plein régime, fournir au pays 14 % de son électricité. Après un retard de douze ans, l'inauguration de cette nouvelle centrale tombe à pic : la guerre entre la Russie et l'Ukraine et l'annonce de la candidature de la Finlande à l'Otan a en effet bouleversé la donne énergétique du petit pays nordique, avec l'arrêt au mois de mai des livraisons d'électricité et de gaz russe, ainsi que l'abandon d'un projet de future centrale nucléaire avec le russe Rosatom. "La réalité, c'est que le changement de programme des Verts ou les effets de la guerre entre la Russie et l'Ukraine ne modifient en rien notre stratégie énergétique, commente Liisa Heikinheimo, directrice adjointe au département Energie du ministère de l'Economie, à Helsinki. Ces événements ne font que renforcer le pragmatisme de nos citoyens et l'acceptation du nucléaire, qui n'a jamais été aussi élevée."  


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